Conférer de l’autonomie aux acteurs de la transformation

changement autonomieBeaucoup de projets importants doivent bénéficier d’un dispositif d’accompagnement pour être efficacement déployés. Ceci est notamment nécessaire pour permettre à ceux qui doivent implémenter et utiliser les produits et services issus du projet de bien en comprendre et s’en approprier les contraintes et les bénéfices. L’objectif de l’accompagnement est de permettre à ces acteurs d’identifier la façon de concilier leurs objectifs personnels et ceux de leurs équipes avec les contraintes, jalons et activités de déploiement dudit projet.

Sans pour autant être un théoricien de la conduite du changement, j’ai eu le plaisir de concevoir et diriger d’importants dispositifs d’accompagnement au changement. Cet article est l’occasion pour moi d’aborder l’accompagnement de la transformation en conservant suffisamment d’autonomie à l’individu et aux équipes qui seront impactés par la transformation.

Illustration par l’exemple

Pour illustrer mon propos, je vais vous raconter l’histoire d’un important projet de transformation auquel j’ai eu le plaisir de participer. En 2008, le gouvernement a lancé la phase opérationnelle de mise en place du passeport biométrique en France. Outre l’aspect biométrique de ce nouveau titre qui a provoqué quelques polémiques (existence d’un fichier avec les empreintes des détenteurs de passeport, existence d’une puce RFID sur le titre…), ce nouveau passeport comportait de nombreuses innovations dans la relation entre l’usager et l’administration. Ces innovations ont introduits de nombreux changements, pour les usagers bien sûr, mais également pour les parties prenantes en charge de collecter et de traiter les demandes de passeport (principalement les mairies et les préfectures). Parmi les principaux impacts, les agents et leur encadrement ont dû prendre en charge la prise de photos sur place (qui a fait long feu depuis), la prise d’empreinte, le changement des lieux de recueil des demandes, la saisie informatique et la télé-transmission du dossier dématérialisé.

Après avoir conçu un plan de communication à destination des mairies et des préfectures, j’ai été en charge du déploiement du programme pour une partie importante du territoire national. Mon rôle consistait à accompagner la déploiement des processus et des dispositifs techniques de recueil des demandes en portant un accent tout particulier aux grandes villes et aux préfectures avec lesquelles j’entretenais des liens réguliers. Je devais informer, sensibiliser, rassurer, aider mes interlocuteurs à résoudre des problèmes logistiques rencontrés lors du déploiement et enfin coordonner l’assistance aux premiers utilisateurs lors du démarrage du recueil des passeports.

A la lumière de cette expérience qui m’aura conduit à visiter physiquement au moins deux fois la trentaine de préfectures et la quarantaine de grandes villes dont j’avais la charge à l’ouest et au sud de la France (et je ne compte pas les sous-préfectures et les villes moyennes ou petites qu’il a fallu rencontrer!), je tire aujourd’hui des enseignements sur la façon de combiner le cadre global d’un programme comme celui-ci avec les adaptations nécessaires pour qu’il soit implémenté avec succès au niveau local.

Adopter pour pouvoir adapter

Adopter le programme c’est en comprendre les objectifs, les bénéfices, les contraintes, les principaux jalons, ce qui est attendu de chacun et les conséquences pour les utilisateurs du nouveau système. A ce titre, la communication tient un grand rôle. Lorsque l’on est en passe d’implémenter une transformation importante qui va changer la façon de travailler de milliers de personnes (c’était notamment la cas pour le nouveau passeport), il est important de combiner information descendante et présentations en face à face pour permettre aux parties prenantes de s’informer sur le programme mais également de poser des questions et de traiter les irritants ou certaines croyances infondées relatives au projet. La communication doit donc être bi-directionnelle : il est au moins aussi important de fournir de l’information que de capter le ressenti et les commentaires terrain pour pouvoir les exploiter et faire évoluer le programme. C’est une phase essentielle de l’adoption qui permet de faire la juste part des choses (entre attentes, fantasmes, contraintes, bénéfices) et de comprendre ce que chacun doit faire pour que le programme fonctionne et porte ses fruits.

Conférer de l’autonomie pour décliner le projet localement

Localement, les acteurs ont besoin d’espace de la part du programme central pour prendre en compte leurs propres contraintes dans le déploiement du nouveau système. Ainsi, dans le cas du passeport, certaines mairies ont fait le choix d’entreprendre d’importants travaux dont le déclencheur était la mise en oeuvre du nouveau passeport (pour permettre la prise de photo par exemple) mais qui ne se limitaient pas strictement à cela. Ces mairies en ont profité pour refaire l’aménagement de l’accueil de l’état civil et on dû composer les échéances de ces chantiers avec la date de démarrage du nouveau passeport dans leur commune. Elles l’ont fait dans le respect des contraintes temporelles imposées par le programme et en respectant le cahier des charges techniques lié notamment au dimensions et caractéristiques des nouveaux dispositifs à installer.

Cela illustre qu’il est possible de tirer parti d’un programme de transformation au niveau local au delà des ambitions affichées, au niveau global, par le programme.

Adapter c’est également faire preuve de créativité pour, par exemple, introduire de nouveaux modes d’organisation qui maximisent les bénéfices du nouveau projet. Dans le cas du passeport, de nombreuses mairies ont mis en oeuvre un système de rendez-vous qui permet aujourd’hui, outre de rationaliser le temps de collecte des demandes par les agents, de diminuer sensiblement le temps d’attente des usagers.

Chaque projet comporte son lot d’opportunités d’adaptations au contexte local qui permettent de combiner meilleure efficacité et facilité d’adoption et de mise en oeuvre. C’est un peu comme si le programme amenait un cadre, un cahier des charges, et que l’implémentation y donnait vie à travers la prise en compte des particularités et des opportunités locales.

Transformer de l’intérieur

Pour que la transformation apportée par le projet soit un succès, il faut combiner au moins trois éléments qui sont davantage liés à l’état d’esprit qui anime chaque personne impactée par le changement :

  • que le projet ait un sens pour ceux qui le mettent en oeuvre localement, que les bénéfices proposés constituent de vrais bénéfices dans leur propre contexte
  • qu’a un moment donné, chaque acteur ait eu l’opportunité de s’exprimer sur ses contraintes, ses doutes et ses croyances par rapport au projet
  • que la réussite du projet aille, autant que faire ce peut, dans le sens de l’atteinte de certains objectifs personnels des parties prenantes.

Il est parfois nécessaire d’accompagner individuellement certains acteurs pour leurs permettre d’inscrire la réussite du projet dans l’agenda de leur propre progression ou de celle de leur équipe. Dans un grand nombre de cas, on fait appel au potentiel d’adaptation du projet au contexte individuel mais également, à l’inverse, à la capacité de chacun à s’adapter aux contraintes apportées par le projet.

Ce type d’accompagnement est souvent mis en oeuvre pour le niveau d’encadrement intermédiaire (middle management ou chefs d’équipe) qui est un maillon essentiel de transmission des directives centrales au niveau local et de remontée des retours terrain vers le programme.

Chaque grand programme de transformation gagnerait à systématiser les éléments clefs (dont il est question dans cet article) au sein de son dispositif de conduite du changement :

  • Remonter les messages provenant du terrain lors de réunions d’informations laissant la grande place au dialogue
  • Mettre en place des mécanismes permettant d’adapter le programme aux réalités locales
  • Proposer l’accompagnement individuel des acteurs qui ont besoin de faire le lien entre leurs propres objectifs et les apports du programme.

Que mettez-vous en oeuvre pour capter le ressenti terrain à chaque phase importante d’un programme de transformation ?

Comment gérez-vous l’articulation global / local d’un tel programme ?

Parvenez-vous à tirer parti du potentiel d’adaptation de votre programme aux contextes locaux ?

Quels moyens donnez-vous aux parties-prenantes d’inscrire leurs objectifs propres dans le cadre du changement ?

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